lundi 23 novembre 2015
Affaire Boulle Mining : Une victoire à la Pyrrhus
« L'Etat comorien remporte le procès en arbitrage à Londres », titrait en Une nos confrères du journal Alwatwan dans leur édition du 26 octobre dernier parlant du procès opposant l'Etat comorien à Boulle Mining group(BMG). Dans son jugement du 20 octobre 2015, la cour arbitrale de Londres a, en effet, déclaré « nul » le contrat relatif à la prospection et l'exploitation énergétique dans les eaux territoriales comoriennes signé en 2011 entre Mohamed Ali Soilihi (Mamadou) vice-président en charge du ministère des finances et Boulle Mining Group (BMG). Cette société basée aux îles Vierges est condamné à payer « les frais légaux et s'acquitter d'au moins 80% des frais pour l'Etat comorien ».
Le succès obtenu à Londres est en ce sens « une victoire » à la Pyrrhus. Notre pays a incontestablement laissé des plumes dans cette sale affaire. En effet, au-delà des moyens financiers dont l'Etat comorien a perdu dans ce dossier, le pays a également vu son image écorchée. L'amateurisme dont, ont fait montre les instigateurs de ce contrat est tout simplement déconcertant. A la lecture du jugement (en anglais) rendu par la Cour arbitrale de Londres détaillant les faits qui ont conduit l'Etat comorien devant cette instance international, on se demande jusque où peuvent aller nos dirigeants politiques dans leurs turpitudes. On y perd son latin entre « les dossiers mal datés », les réunions qui se tiennent sans compte rendu et qu'on s'arrange pour le faire un peu plus tard, les approximations sur les dates et les personnes ayant signé cet accord. Retour sur un litige qui a failli coûter des milliards à l'Etat et aux contribuables comoriens.
C'est l'histoire d'un contrat signé sur un coin de table entre « copains » et qui engageait tout un pays pendant 45 ans sans que le gouvernement et non plus l'Assemblée nationale soient informés. En effet, en 2011 alors que Fouad Mohadji, vice-président en charge de l'énergie au moment des faits était absent du pays, son homologue chargé des finances Mohamed Ali Soilihi (Mamadou) conclu un contrat avec Boulle Mining Group ltd qui prévoyait des prospections dans six sites dans les eaux territoriales comoriennes.
Un deal dont la Cour de Londres a qualifié d' « amateur » car il (Mamadou, ndlr) n'était pas habilité à le faire ». L'instance basée dans la capitale anglaise rappelle également que « deux autres sociétés internationales ont bien signé un tel accord mais elles ont obtenu le feu vert de l'Assemblée nationale » alors qu'avec cet accord litigieux, il semble qu'il s'agissait juste d'un arrangement entre le vice président Nourdine Bourhane qui assurait l'intérim du chef de l'Etat à cette période et son homologue des finances qui a conduit à sa signature. Un bien mauvais service rendu à l'Etat par ses représentants...
La Cour relève ensuite le fait suivant pour démonter la théorie fumeuse de BMG qui réclamait plus d'un milliard de francs comoriens à l'Etat pour « rupture de contrat » : « un accord a été signé par un officiel dont l'autorité a été délégué oralement, cette délégation de pouvoir aura duré trois jours avec comme conséquence la signature d'un contrat quatre semaines plus tard. La délégation de pouvoir s'étend jusqu'à ce que le job ait été mené à terme. L'officiel n'a négocié que le temps d'une soirée avec des personnes ne sachant rien dans la prospection minière et il n'y a aucun relevé ou de compte rendu de cette soirée là. L'officiel a signé le document qui lui a été remis sans consulter ses pairs ». Pour la cour, Mohadji n'a pas signé, et l'exercice a été conclu par une personne « très accommodante et très engagée avec la délégation BMG ».
Il est en effet apparu que lorsque Mohamed Soilihi a signé « l'accord, Mohadji était absent des Comores et son remplaçant était le ministre de l'éducation Mohamed Issimaila et donc Soihili ne pouvait être ministre de l'énergie par intérim ».
Dans son jugement la Cour arbitrale de Londres, établi que le vice président Mohamed Ali Soilihi a surpassé ses prérogatives et contourner les procédures dans cette affaire. Son homologue Fouad Mohadji l'avait, d'ailleurs, vertement critiqué pour sa conduite. Il est indiqué que l'ancien ministre des affaires étrangères Dr M'tara Maecha, intermédiaire de la BMG aux Comores, « s'est tourné vers des personnes n'ayant rien à faire avec ce genre de contrat. Il n'a même pas tenu au courant le ministre indiqué pour un tel accord c'est-à-dire le vice président Fouad Mohadji ».
Maecha qui selon la Cour « a été très vague lors de son interrogatoire » a insisté «pour dire que l'accord a été signé le 6 novembre alors que le dossier de BMG fait mention d'une date au début de décembre ». Tout est flou dans cette affaire. On constate bien que la transparence est le dernier souci de nos excellences. « Bien que membres du gouvernement, il apparait que Mamadou, Nourdine Bourhane et M'tara ont des responsabilités clairement exposées dans l'affaire. Boulle Mining se conduisait en amateur ou colonialiste sûr d'agir dans une république bananière », commente un observateur de la vie politique nationale qui ajoute : « Si les politiques étaient bien organisés chez nous, Mamadou et Nourdine sauteraient toute suite ». Soulignons que ces deux personnalités souhaitent solliciter les voix des Comoriens lors des élections de 2016.
Faïssoili Abdou
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