mercredi 28 octobre 2015

SAID MOHAMED CHEIKH :CE QUE J’AI RETENU SUR L’HOMME ET LE Président


SAID MOHAMED CHEIKH :CE QUE J’AI RETENU SUR L’HOMME ET LE Président
Le 16 mars 1970, nous quittait le Dr Saïd Mohamed Cheikh, premier Président du Conseil des Comores. Comme pour tous les Grands hommes, le bilan de son action est sujet à controverses.

En me référant aux mémoires de feu Cheikh Ahamed Kamariddine, son ancien compagnon et son ancien conseiller spécial, à Dar Saanda, l'ancien palais présidentiel, il était un homme en avance de son temps, un visionnaire, un incompris, un homme de caractère.
Médecin de formation, il a exercé à Tananarive et au sein du service de santé des armées durant la deuxième guerre mondiale.

En 1949, Michel Debré, en quête d'une circonscription, pour se faire élire député, est allé le rencontrer à Tananarive, en compagnie de Kamariddine, journaliste à l'ORTF. Il a sollicité leur soutien, pour sa candidature au poste de Député des Comores. Ils ont réservé leur réponse. Finalement, le Dr Saïd Mohamed CHEIKH, a décidé de briguer le mandat. Michel Debré s'est donc rabattu sur l'île Bourbon, où il a été élu sans discontinuité jusqu'à son retrait de la vie politique.

En 1958, au moment des consultations sur les indépendances en Afrique, les Comores ont opté pour le maintien à la communauté française, grâce aux efforts du Dr Saïd Mohamed Cheikh, Député de Gauche. Cette période phare de l'histoire contemporaine des Comores, s'est vu opposée deux styles et deux philosophies du devenir des Comores. Pour le prince Saïd Ibrahim, patron du PEC Parti pour l'Evolution des Comores), militant du parti conservateur de droite, le NON à la communauté française, était la solution adaptée.

Le Dr S.M. Cheikh, savait pertinemment, que la position du prince n'était pas une conviction, mais une vengeance au sort réservé à son père par l'administration coloniale. Selon les résultats de ce référendum plus des 58% des Mahorais, partisans du prince, ont opté pour le NON, mais le Oui l'a remporté largement.
Au-delà des deux positions affichées, cette querelle, cachait, un règlement de compte familial. Voici ce que nous a légué la version orale de la fin des sultanats aux Comores.

Le dernier sultan de Ngazidja, Saïd Ali Bin Sultan, est mort à la prison de Tamatave, après avoir purgé une partie de sa peine, à l'île de Sainte Marie, à Madagascar, et à Saint Suzanne sur l'île Bourbon. Le député S.M. Cheikh n'a jamais demandé sa réhabilitation à titre posthume.

Ce comportement agaçait le prince, mais pourrait s'expliquer par un fait, qui se serait déroulé après la signature du protectorat français par le sultan Saïd Ali Bin Soultan. Saïd Mohamed Bin Cheikh, patron de la « Mouride Kadiri », aux Comores, s'était vigoureusement opposé et avait qualifié le sultan Saïd Ali de « Kéfir » (mécréant).

En riposte, le sultan l'a fait arrêter et, à son palais, il l'aurait attaché et craché sur son corps, toute une journée. Ceci peut donc expliquer cela.

Par cette signature, les Grands Comoriens, se sont sentis doublement trahi par leur souverain. Ils ont gardé depuis, une haine, en sous marin, envers la famille royale. Cette haine a débordé, et s'est répercutée sur la présence française aux Comores. Cette dualité a marqué jusqu'à ce jour, la politique comorienne. Pour ma part, deux dates, ont marqué mes esprits.

Primo, j'ai appris par des acteurs de cette date, qu'en 1962, le Président du conseil, a pris un arrêté portant dissolution de l'AJC (Association de la Jeunesse Comorienne). Cette association, qui fut l'ancêtre des partis politiques, regroupait toute la jeunesse, avait entamé les premières réformes, du « ANDA », par une réduction importante du parcours social, conduisant à la classe de notable.

Paradoxalement, cette idée phare, a été le cheval de bataille du Président durant son mandat. La dissolution de l'AJC, n'a pas pour autant arrêter ses activités. Ses sections notamment, celles de Moroni, qui a débouché sur ASMUMO, de Mitsamiouli, qui a donné naissance au « Yamine ZAMANE » (Gauche Ancienne) et « Yaminil DJADID » (Gauche Nouvelle), de Mbéni, qui a donné naissance « Yamine » (Gauche) et « Chimal » (Droite), de Ntsoudjini, sous la direction du violoniste « Djivisa », de Chindini avec le musicien « Mbarouk », ont continué à rayonner et rependre les idées qui étaient les leurs. Mais c'est à Mitsoudjé, où les idées de l'AJC, ont eu le plus de répercussion et s'est installées dans les esprits.
Secundo, la décision prise en 1967, de renouveler toute la classe politique, en confiant aux jeunes cadres les postes de représentants à la chambre des députés, a surpris. Elle répondait en tout cas à la philosophie de la société comorienne. Le Dr Cheikh, a très bien compris que le pays est de tradition orale. En confiant à la jeunesse, les rênes du parlement, il a pris le pari, de laisser pour au moins une cinquante d'années, sa marque dans la vie politique. Toute cette génération, a gardé un souvenir indélébile, qui se traduit par la mobilisation autour de son œuvre. Ali Soilihi Mtsachioi est l'autre homme politique à prendre un tel pari.
Cette décision n'était pas sans effet sur la population. Elle a été à l'origine du deuxième soulèvement de Mboudé. Le premier s'est déroulé à la fin des années 40, lorsque l'administration coloniale avait décidé de taxer le bétail et les terrains. Ce second soulèvement était pour protester, contre le premier choix de S.M. Cheikh, du candidat de Mohamed Amound, au poste de député de Mboudé, contre la volonté des notables de cette région, qui ont fait le choix de M. Soidiki. Le compromis proposé par S.M. Cheikh en la personne d'Ali Mlahaïli, n'a pas soulagé la détermination de la population. La population de la région, a eu du mal à entériner ce choix à cause des origines sociaux du nouveau député.

De cette affaire, on peut retenir, la maitrise et le sang froid du Président. Il a accepté de survoler par hélicoptère, la région de Mboudé, pour se rendre à Mitsamiouli, au lieu d'envoyer les troupes, massacrer des innocents. La notabilité de la Grande Comore, par la voix de Hadj Abdoulkarim Djoubéfoum, le père de Mohamed Taki, répondant à une proposition de Mohamed Omar, notable à Ntsaouéni, a proposé la solution à cette crise. Le Président s'en est sorti. Ali Mlahaïli est resté Député.

Pour parachever son entreprise, le Président SM Cheikh, a suivi le choix des notables du canton d'Itsandra, en la personne d'Ali Bazi Selim et dans le canton de Hambou, le notable Ali Yamani, a proposé Abdoul Anziz Hamadi. Comme il n'a pas voulu laisser un cadre sur le tapis, il a désigné Ali Soilihi, député d'Oichili, en accord avec les notables de canton

Par : Abdel Kader Ahmed Koudra

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