Les îles Eparses, riches de promesses et
source de contentieux
Les îles
Eparses, ces grains de corail dans l’océan Indien administrés par la France, riches en poissons et hydrocarbures,
attisent des revendications territoriales de la part des pays voisins,
Madagascar en tête.
Les
Glorieuses, Juan de Nova, Bassas da India et Europa s ?égrènent de l’extrême
nord du canal du Mozambique jusqu’au sud, certaines à moins de 150 km des côtes
malgaches. Tromelin est la seule à l’est de Madagascar. De leurs 43,2 km2 de
terres découle une zone économique exclusive (ZEE) de 636.000 km2, soit une
bonne moitié de ce canal qui est aussi une route maritime importante.
Plusieurs études scientifiques estiment de
6 à 12 milliards de barils de pétrole et de 3 à 5 milliards de m3 de gaz les
réserves au large du Mozambique. Le canal du Mozambique serait "une
prochaine mer du Nord en puissance", selon un rapport de l’United States
geological Survey (USGS) de 2010.
Des
campagnes de prospection sismiques sont en cours dans les blocs de Madagascar,
du Mozambique, et dans la ZEE de Juan de Nova où relevés et carottages sont en
cours d ?évaluation. Des demandes sont en cours d’instruction pour la ZEE
d’Europa. Les périmètres de ces ZEE ont été déposés "selon les règles
internationales", assure-t-on côté français, mais ils sont contestés côté
malgache.
"L’intérêt
pour la France est de savoir
s’il existe des gisements entre 1.500 et 2.000 m de profondeur qui pourraient
donner lieu à une exploitation. Le Mozambique est déjà passé à la vitesse
supérieure, en phase d’exploitation dans les blocs à proximité de ses
côtes", explique Pascal Bolot, préfet des Terres australes et antarctiques
françaises (TAAF), collectivité française qui gère depuis 2007 les îles
Eparses, devenu son 5e district.
"Le
fait que l’on puisse y découvrir des ressources, c’est un point positif mais
qui ne change pas la position de la France : nous sommes légitimes dans ces
îles", souligne M. Bolot. "La souveraineté française sur ces îles est
une question réglée", abonde le Quai d’Orsay.
C’est justement
ce que conteste Madagascar depuis 1973. L’ancienne colonie française,
indépendante depuis le 26 juin 1960, n’a pas digéré que le général de Gaulle
ait signé un décret quelques semaines avant - le 1er avril - pour les détacher
de la Grande île et les rattacher au ministère des DOM-TOM.
"C’est
une violation du principe de respect de l’intégrité d’un territoire au moment
de son accession à l’indépendance", fait valoir lors d’un colloque fin
avril Harimanana Raniriharinosy, maitre de conférence en droit international à
l’université d’Antananarivo.
Négocier une cogestion -
Il s’appuie
notamment sur deux résolutions de l’ONU de 1979 et 1980 "invitant" la
France à ouvrir "sans tarder" des
négociations pour une "réintégration" de ces îles "séparées
arbitrairement de Madagascar".
Ce sujet a
violemment refait surface fin 2013 lors de la campagne pour l’élection
présidentielle malgache, sur fond de résurgence du nationalisme. Une fois élu,
le président Hery Rajaonarimampianina a infléchi son discours ne parlant plus
de "revendications" mais de "négociations".
Au Quai
d’Orsay, on fait valoir que "les différends sont gelés et que l’enceinte
des discussions, c’est la Commission de l’Océan indien (COI)". Les
président français et malgache vont justement s’y voir le 26 juillet, pour la
prochaine réunion de la COI à Moroni. "La question de la cogestion, nous
sommes prêts à en discuter", assure-t-on au ministère des Affaires
étrangères.
D’autres
îles françaises sont source de tensions dans cette zone. Mayotte est devenu
département français en 2011 tandis que l’Union des Comores —hôte de la COI —
la considère comme sienne depuis le référendum d’autodétermination de 1973.
Des pêcheurs
comoriens viennent régulièrement dans la ZEE mahoraise, qu’ils considèrent
comme leur, n’entraînant que de molles réactions de Paris. En effet, le
problème majeur pour la France est de gérer
l’afflux constant de migrants clandestins, que les autorités comoriennes
laissent partir sans contrôle, jusqu’à représenter près de 20% de la population
de Mayotte.
Un projet d’accord migratoire est sur la
table de la COI.
Enfin,
Tromelin, revendiquée par l’île Maurice pour ses ressources en thons, a fait
l’objet d’un accord de cogestion en 2010, que Maurice a ratifié mais pas encore
la France où le texte est bloqué à l’Assemblée
nationale.
Cet accord
fait grincer des dents à Madagascar :
cet ilot
recèle des sépultures malgaches, attestant d’une ancienneté de la présence.
Clicanoo.re
20 juillet
2014
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